Notre corps nous parle
Nous sommes des êtres de langage. Utiliser nos sens pour communiquer avec notre environnement est un acte réflexe et naturel. Cela ne reste pas, pour autant, toujours facile et active en nous tout un processus réactionnel conscient et inconscient. En revanche, communiquer avec notre corps n’est pas un acte naturel. Pourtant il n’a de cesse de se faire entendre, qu’il soit heureux, malheureux, épanoui, renfrogné, souffrant, en pleine vitalité.
Ne vous est-il jamais arrivé de vous lever le matin avec une douleur physique, ou bien avec l’impression de se sentir « bizarre » ? Parfois il peut arriver que certaines personnes n’aient même plus le goût de se lever. Ou bien, au sortir d’un bon repas entouré de collègues ou d’amis percevoir quelques heures plus tard une difficulté à digérer. Vous mettrez cela sur le compte d’un repas trop lourd ou bien d’une phrase entendue qui vous a déplu ou à l’inverse sur des propos que vous avez émis envers une personne du groupe. Une petite culpabilité pointe alors son nez et votre corps commence à vous parler et met tout en œuvre s’il le faut pour que cela ne passe pas inaperçue.
Exemple
Alexandre doit participer à un déjeuner d’affaires avec ses responsables et certains collègues qu’il n’apprécie guère pour les raisons qui lui sont propres. Au cours du repas, l’un d’entre eux, fort en verbe et ayant un besoin de reconnaissance manifesté, relate ses activités de la semaine et le chiffre d’affaires rapporté à la société. Alexandre ne supportant plus son attitude, se lève, jette la serviette sur la table agressivement et quitte le groupe quelques instants manifestant le désir de se rendre aux toilettes…
Cet incident est peut-être passé inaperçu auprès de ses supérieurs, le collègue lui-même se gargarisant de ses mérites annoncés ne s’aperçoit pas de son absence sur l’instant.
Mais Alexandre, lui vit mal cet événement. Chamboulé par un mélange de colère envers son collègue, un sentiment de culpabilité vis à vis du groupe et une dévalorisation qu’il se refuse de voir sur l’instant, le propulse dans une situation où il se sent coincé et sans issue. Il ne peut même pas partager ce qu’il vit, il est seul dans les toilettes et l’événement tourne en boucle dans sa tête.
Ce qu’il sait, c’est qu’il doit revenir à table et « faire bonne figure » devant ses supérieurs. Chose faite, le déjeuner suit son cours. Au cours de la journée, Alexandre se rend compte qu’il a l’estomac lourd, des écœurements et un nœud à la gorge lui laissant une impression désagréable de cette journée. Puis….il oubli.
Cette histoire peut sembler des plus banales pour autant un « petit événement » comme celui-ci s’avère être le déclencheur d’un trouble physique pour quelques jours ou plusieurs mois ; il peut aussi s’aggraver si Alexandre ne prend pas conscience de ce qu’il a réellement vécu au cours de ce repas. S’il reste avec la certitude qu’il ne peut rien faire face à son collègue et/ou dans une situation similaire, ses symptômes deviendront chroniques, éventuellement il fera le lien entre ses contrariétés vécues et les douleurs, mais quand fera t’il ?
Il prendra des médicaments pour calmer et faire passer les symptômes, ce qui ne fera que maintenir le voile de l’oubli sur la cause actuelle de sa pathologie. Celle-ci pourra ainsi évoluer, évoluer et devenir dans le temps une réelle maladie où les médicaments habituels n’auront plus de prise sur ses manifestations physiques.
Comment faire le lien entre le corps et l’esprit
- Qu’aurait pu faire Alexandre quand il a ressenti ses douleurs ?
- Comment aurait t’il du agir ?
- Qu’aurait pu faire Alexandre durant ce repas ?
- Que n’a t’il pas vu en lui à ce moment là ?
- De quoi n’est-il pas conscient ?
Comme beaucoup d’entre nous, Alexandre n’a pas appris à écouter ses émotions, à les vivre et à les exprimer. Il ne sait pas que son collègue par son attitude, réveille en lui une blessure affective non résolue, un sentiment enfoui et bien caché dans sa mémoire émotionnelle. Il a développé grâce à son mental, des masques constituant les différentes facettes de son égo afin qu’il puisse continuer à faire face à tout ce qui peut être « dangereux » pour lui.
Nous croyons nous protéger derrière ces masques mais ils nous entrainent dans un comportement répétitif et surtout sclérosant. Notre attitude est alors de croire que c’est la faute de l’autre, que c’est l’autre qui est responsable de notre changement d’humeur. Pas nous ! Nous on y est pour rien !
Si seulement à un moment cette croyance est remise en question, alors peut s’ouvrir une porte vers une autre vision que celle perçue depuis toujours. Si nous considérons que l’autre n’est pas seul responsable dans l’histoire et mieux encore si nous le voyons comme un miroir, cette porte ouverte va nous permettre de regarder en nous-mêmes. Quelle sera cette vision ?
Le langage du corps : un outil de communication
Chaque malaise ou maladie vient nous dire quelque chose. Notre corps nous parle, c’est sa façon à lui de communiquer avec nous. Il vient nous dire qu’il y a disharmonie, déséquilibre ou coupure entre lui et notre véritable Moi.
Pas celui construit au fil des années et constituant notre égo mais notre être profond, notre essence ou âme. Les mots sont malheureusement reliés là encore à la définition que l’on en connaît et comme nous n’avons pas tous le même langage, ni la compréhension identique d’un même mot, laissez-vous aller à ceux que je vous propose sans jugement ou interprétation.
Pour revenir au lien entre les messages de notre corps et nos pensées, la seule manière de pouvoir les comprendre et d’agir pour retrouver notre harmonie intérieure est de « voir » et de toucher à nos émotions !
3 étapes incontournables
1. L’observation
Dans notre exemple, c’est l’attitude arrogante du collègue d’Alexandre et ses propos qui déclenchent en lui une ou des émotions.
Étape prioritaire qui nous demande déjà de la volonté et qui s’apprend. Ce n’est pas naturel en effet de s’observer. Nous sommes instinctivement attirés par l’extérieur et le regard nous porte au loin, autour de nous. S’observer demande à porter le regard en nous tout en restant présent à l’extérieur. Nous ne pouvons changer ce que nous ne connaissons pas. Il nous faut donc voir ce qui est en nous pour établir le lien entre les manifestations physiques et nos émotions. Observer ce qui les déclenche et dans quelles situations.
2. L’acceptation
Dans notre exemple, Alexandre ne veut peut-être pas voir son conflit de dévalorisation. Se pourrait-il qu’il se refuse à admettre vouloir la place de son collègue ? Peut-être aimerait-il lui aussi pouvoir présenter fièrement ses résultats de travail autour de cette table ? Que n’accepte t’il pas en lui et qu’il ne peut supporter chez les autres ?
Cette deuxième étape est comme la mesure posée dans une balance. Elle permet la bascule pour retrouver l’équilibre ou faire pencher la balance du bon côté. Cela nous demande de bien regarder la réalité. Pas ce que je veux ou ce que je ne veux pas mais ce qui est.
Accepter c’est reconnaître, dire oui.
Sans ce oui qui vient du cœur, qui nous amène à voir, à constater, sans jugement, sans interprétation, rien ne peut changer. Tant que le mental refuse, lutte et cherche des excuses, l’acceptation n’est pas.
3. L’interprétation
La suite logique des deux premières étapes sera de changer l’interprétation faite de l’événement déclencheur tout d’abord, puis peut-être de celui qui est à la source d’une équation réactionnelle inconsciente.
Lorsque nous avons observé ce qui nous fait souffrir, accueilli les émotions qui en sont liées et que nous avons dit « Oui », « oui, c’est vrai, je le vis comme cela ». Alors, nous sommes prêts au changement.
Changer l’interprétation, c’est donner un sens à l’émotion qui s’éveille en nous. C’est réhabiliter notre capacité d’être ce que l’on est, point. En acceptant ce qui est et en donnant la possibilité à nos émotions de monter en nous, on libère une énergie de transformation et de liberté. Laisser monter l’émotion en nous, c’est observer combien elle occupe tout l’espace, nous envahit, nous déchire ou nous ravit. Peu importe, car c’est l’émotion qui nous donne accès au langage de notre corps. Sans elle, aucune possibilité de sentir ce que l’on vit ou que l’on bloque en nous.
Dans notre exemple, si Alexandre avait accepté l’émotion qui le submergeait face à ce collègue, s’il avait su se placer en observateur, dire oui à ce qui est et accueillir l’émotion (ici la colère), celle-ci se serait évanouie à l’instant même de l’acceptation. Car, Alexandre n’aurait pas lutté, il aurait agi ! D’abord en mettant du sens sur cette colère.
Et peut-être pensé : « Oui, ce collègue me dérange car je me sens moins que lui » ou « Merci collègue, tu me rappelles que je suis entrain de me juger, de me dévaloriser » ou encore plus simplement « Qu’est-ce que j’ai à comprendre de cette émotion que je vis là sur l’instant ? » « Que vient-elle me dire ? »..Puis en s’exprimant à sa manière et en donnant son point de vue plutôt que de fuir.
L’émotion, la porte de la transformation
Ce dialogue avec soi, lorsque nous sommes capables de l’instaurer transforme radicalement notre vision de l’extérieur et par ricochet de notre monde intérieur. En recherchant l’origine de certains états émotions, dénonciateurs de perturbations physiques et psychiques, qui les font naître à des moments que nous ne maîtrisons pas, c’est prendre conscience que nous pouvons devenir décideur de conserver ou non le mode opératoire enregistré à un moment de notre vie. Il peut arriver aussi que ce mode opératoire ne nous appartienne pas, je veux parler de nos mémoires familiales et de l’appartenance au clan..
Bien souvent, il nous faut donc remonter dans notre enfance ou encore plus loin dans l’histoire de nos familles pour retrouver la source de ces émotions incontrôlées.
On appelle cette démarche une thérapie émotionnelle. C’est en fait un retour vers soi. Le thérapeute instaure un dialogue avec l’adulte du moment ou bien encore avec l’enfant que nous avons été.
Le thérapeute devient le conducteur de cette connexion avec notre enfant intérieur (celui toujours présent en nous que l’adulte oublie ou étouffe) et conduit par imagerie mentale ou jeux de rôles, l’adulte d’aujourd’hui à revivre des émotions refoulées durant le stress vécu dans l’événement négatif du moment ou passé. Il facilite l’émergence et l’expression du sentiment négatif (dévalorisation, culpabilité, impuissance..) enregistré.
Alors le regard qui est posé et la nouvelle compréhension de l’adulte d’aujourd’hui sur cette expérience passée, accompagné par le thérapeute, pourra donner un sens concret et bien plus positif dans ce que vit la personne au présent. Il favorisera l’action et non la réaction.
Je vous souhaite de faire de ces émotions un lien entre votre corps et votre esprit, Car notre meilleur ami est en nous et ce pour la vie !