L’influence du lien d’attachement sur la réussite scolaire

L’élaboration de la théorie de l’attachement (Bowlby, 1958) a permis aux chercheurs de s’intéresser aux rôles des premières relations affectives dans le développement de l’enfant. En effet, les années 1960 ont permis aux psychologues du développement de s’emparer de la thématique de recherche sur l’attachement. Or, depuis de nombreuses études ont permis de montrer que la qualité de l’attachement de l’enfant, avait un impact sur le développement social, émotionnel, cognitif ou encore langagier à son caregiver. Ce lien semble essentiel pour l’acquisition des connaissances et compétences. Les auteurs suivants ont montré qu’une corrélation existerait entre l’attachement et les compétences cognitives.

Goussé. V & Steen M. (2011) ont montré dans leur étude que plus un enfant est sécure, meilleures seraient ses compétences cognitives.

Christi Bergin et David Bergin (2009), dans leur étude témoignent aussi du fait que la qualité de l’attachement influence les performances scolaires. Les élèves qui considèreraient leur enseignant comme une base de sécurité, auraient de meilleurs résultats scolaires que ceux pour qui l’enseignant serait une figure d’attachement insécure.

Selon d’autres auteurs, les enfants insécurisés à leurs parents éprouveraient plus de difficultés à établir des relations de bonne qualité avec des personnes de leur entourage et seraient moins engagés dans les tâches cognitives et scolaires (Bacro et Florin, 2008, Moss et Saint Laurent, 2001).

Cohn (1990) a mis en évidence dans une recherche que les garçons insécures avaient plus de problèmes d’adaptation scolaire et étaient moins sociables mais il ne retrouve pas les mêmes résultats chez les filles.

Jacobsen & Hofmann (1997) ont montré que les représentations de l’attachement des enfants de 7 ans avaient une influence sur la réussite scolaire.

Aux vues de ces résultats, il nous a paru intéressant de pointer l’importance du lien d’attachement mère et père sur la réussite scolaire. Après un bref rappel de la théorie de l’attachement, nous parlerons du concept d’attachement, des modèles internes opérants, de la situation étrange et des différents types d’attachement qui en ressortent, de l’impact du lien d’attachement sur la socialisation et du lien entre l’attachement et des troubles des apprentissages.

Nous terminerons cet article en parlant du triangle de Geddes (2006) qui nous permettra de comprendre l’importance du lien d’attachement dans le milieu scolaire et comment ce dernier intervient dans les apprentissages scolaires. Pour finir, nous conclurons cet article en émettant l’hypothèse suivante : en agissant sur le lien d’attachement, pourrions- nous améliorer les résultats scolaires de nos enfants ? 

1. La théorie de l’attachement

L’attachement est défini par Bowlby comme : « un équilibre entre les comportements d’attachement envers les figures parentales et les comportements d’exploration du milieu. » (Bowlby J. Attachement et perte, Paris, PUF, 1978). Ce lien précoce repose sur des fondements biologiques et des propriétés motivationnelles comparables à la satisfaction des besoins primaires mais indépendants de ceux – ci. Le but de l’attachement est que l’enfant se sente en sécurité, protégé et confiant.

a. Le concept d’attachement :

Bowlby (1958) a élaboré la théorie de l’attachement en y intégrant des apports psychanalytiques (angoisse de séparation, nature des liens affectifs), les travaux de Spitz (1946) relatant les effets de la privation maternelle et des apports de l’éthologie permettant de considérer que les liens affectifs sont innés et indépendant du besoin alimentaire de l’enfant. Solliciter un parent ou, maintenir un contact avec lui sont des agissements qui ont pour fonction de s’assurer de sa proximité. En situation de danger, l’enfant a besoin de sa figure d’attachement. Il doit pouvoir se dire qu’il peut faire appel à celle – ci à chaque fois qu’il se trouvera dans une situation alarmante pour lui. Ainsi la peur ne l’accompagnera pas et il pourra explorer son environnement.

Ces comportements sont organisés en système (notion empruntée à la cybernétique). Le système d’attachement a pour fonction de protéger l’enfant en permettant d’établir la proximité de la mère.

Il est divisé en deux types de comportements « signal » ou d’« approche ».

Les comportements de signal sont ceux qui permettent d’amener la mère à l’enfant (pleurs, sourire, babil).

Les comportements d’approche sont ceux qui permettent d’amener l’enfant vers la mère (approche, agrippement, succion).

L’attachement a en fait une double fonction adaptative qui consiste d’une part à assurer la protection de l’enfant et d’autre part à permettre à celui – ci de s’ouvrir au monde extérieur (Pierrehumbert, 2003). Ainsi, contrairement à ce que disait Bowlby (1958), le système d’attachement semble étroitement lié au système d’exploration. Quand un des deux systèmes est activé, l’autre est complètement inhibé. Ces deux systèmes sont donc vus comme complémentaires.

Selon les évènements vécus (stress, détresse émotionnelle ou crainte de perdre la figure d’attachement), le système d’attachement va permettre de mettre de la distance entre l’enfant et sa figure d’attachement. Il va alors s’adapter, s’autoréguler ou tendre vers un équilibre.

En revanche, si une menace de séparation avec la figure d’attachement entraine une activation du système d’attachement, celui – ci se dérègle.

Si la figure d’attachement est accessible pour l’enfant et disposée à réagir positivement envers lui, cette dernière sera déclarée comme étant disponible pour l’enfant.  Selon Bowlby (1978), une figure d’attachement qui procure de la sécurité à un enfant montre une rapidité de réponse avec des interactions très intense avec l’enfant.

A l’inverse si un nouveau stimulus éveille chez l’enfant une certaine curiosité et que celui-ci semble préoccupé par sa propre protection, il ne sera pas en mesure d’explorer le monde qui l’entoure. Sa figure d’attachement sera déclarée comme indisponible.

L’attachement représente un moyen pour l’enfant d’évoluer hors du danger et de pouvoir apprendre à maitriser l’environnement à son rythme. Plus l’enfant apprend à se débrouiller seul et à discerner les menaces extérieures, moins celui-ci sollicitera l’assistance d’un adulte. C’est pourquoi l’attachement est une façon pour l’enfant d’acquérir son autonomie. Il incombe donc à l’adulte d’accompagner l’enfant dans la découverte de son environnement et de l’aider à identifier les différentes menaces qui s’y trouvent afin qu’il arrive à y faire face. C’est grâce à un échange d’information entre l’enfant et le parent, qu’il pourra se familiariser avec ce qui l’entoure. Grace à la présence rassurante du parent, l’enfant est en confiance pour faire ce qu’il n’oserait jamais faire. Le niveau de risque lui parait moindre parce qu’il sait qu’en cas de difficulté, il pourra compter sur la présence de l’adulte pour lui venir en aide.

Il y a donc d’une part des comportements visant à rechercher la proximité affective de la figure d’attachement mais également des représentations internes et des croyances qui se forgent au fil des expériences d’interactions entre le sujet et la figure d’attachement.

b. Les Modèles Internes Opérants

L’enfant développe ainsi des stratégies d’attachement (Main, 1990) et des modèles Internes opérants (MIO) (Bowlby, 1984).

La réaction d’un enfant à chaque fois que celui-ci se trouve face à une situation menaçante pour lui, est conditionnée, par l’anticipation qu’il se fait de la sensibilité et la disponibilité de sa figure d’attachement. Ces représentations découlent des modèles opératoires appelés : « Modèle Interne Opérant (MIO). Ces modèles sont formés à partir des représentations mentales de soi, de l’autre et du monde qui sont issues des échanges avec l’entourage familial (Miljkovitch, 2001).

Un modèle Interne Opérant est formé à partir des relations que l’enfant a intériorisées avec l’autre. Ces représentations influencent la façon dont l’enfant va percevoir et interpréter la réalité ainsi que ses propres comportements. Ils vont aider l’enfant à comprendre, à interpréter le comportement de son entourage et à explorer le monde. Un attachement sécure permet à l’enfant d’aller explorer le monde qui l’entoure avec la conviction d’être protégé par sa figure d’attachement lors de la survenue d’un danger.

Au fur et à mesure du développement de l’enfant, la présence de la figure d’attachement de l’enfant est intériorisée. L’enfant peut alors s’éloigner d’elle jusqu’à accepter son absence physique. Le parent constitue une base de sécurité qui permet à l’enfant d’être libéré des préoccupations liées à la relation d’attachement pour se consacrer à la découverte du monde qui l’entoure. Ce sont donc des représentations mentales conscientes et inconscientes à partir desquelles l’individu perçoit les évènements.

C’est donc la relation d’attachement qui permet à l’enfant de construire un modèle interne opérant (Guedeney, N. 2011).

Grâce à « la situation étrange » proposée par Mary Ainsworth, nous pouvons ainsi déterminer le type d’attachement des enfants.

c. La « situation étrange et les différents types d’attachement

Mary Ainsworth et al. (1978) a mis au point la situation étrange qui permet d’identifier les différents comportements d’un enfant de 12 mois face à la séparation d’avec sa mère. Il s’agit d’un scénario d’une vingtaine de minutes, fait de séparations et de retrouvailles. Il y a huit épisodes de 3minutes. Le but est d’observer comment s’organise l’enfant dans une situation étrange. En fonction du comportement de l’enfant au moment des retrouvailles, Ainsworth va pouvoir décrire trois cas de figures : l’enfant sera dit « sécure », « insécure – ambivalent » ou encore « insécure – évitant ».

Les enfants décrits comme « sécures » protestent naturellement au départ de leur figure d’attachement et cessent à leur retour. Pendant la situation étrange, ce sont des enfants qui explorent leur environnement en présence de leur figure d’attachement et affichent leur désarroi en son absence tout en la recherchant. Le contact peut être établi à distance. L’enfant n’est pas perturbé par la séparation et s’il l’est, il se laisse réconforter par l’étrangère qu’il différencie très bien de leur mère. Ce sont des enfants confiants car ils savent qu’ils peuvent obtenir du réconfort en cas de besoin. Ils sont disponibles psychologiquement pour s’intéresser au monde qui les entoure. Ils parviennent à activer leur système d’attachement de façon optimale. Cette modalité concernerait 65% des enfants (Miljkovitch, 2001).

En revanche, les enfants dits « insécures – ambivalents » ou anxieux – ambivalents vont protester de façon plus importante lors du départ de leur mère et ne retrouvent pas facilement leur calme à son retour. Ils éprouvent à la fois de la colère et un besoin d’être réconfortés, ils font preuve de résistance au moment des retrouvailles et sont dans une attitude ambivalente à la fois de recherche et de refus de contact avec leur figure d’attachement. Ces enfants se focalisent sur le parent au détriment de la possible exploration du monde les environnant. Les enfants ambivalents sont très malheureux quand la mère est absente et refuse le contact quand celle- ci revient. Cette modalité concernerait 15% des enfants (Miljkovitch, 2001).

Ainsworth a identifié une autre modalité d’attachement à partir de cette expérience. Les enfants qui ont pu constater que leur besoin de réassurance ou d’appel à l’aide conduisaient au rejet vont développer un attachement dit « insécure – évitant ». Ils vont ainsi plutôt que de risquer de faire à nouveau l’expérience de rejet, éviter de reproduire cette situation en détournant leur attention de leur figure d’attachement. Ils adoptent une attitude apparente d’indifférence ou d’évitement au départ et au retour de leur mère. Ils vont jouer tout au long de l’expérience : ce jeu prend un caractère factice car l’enfant utilise le jeu pour détourner son attention de sa mère. Ces enfants sont moins actifs. Ils ne comptent pas sur la mère pour les sécuriser. Cette modalité concerne 20% des enfants.

Main et Salomon (1986) ont ultérieurement décrit une quatrième modalité d’attachement : les enfants désorganisés – désorientés. Ces enfants ont des comportements étranges qui peuvent interroger sur leurs relations avec leur figure d’attachement ou leur entourage : négligence, abus, maltraitance… d’une manière plus générale, ces relations sont marquées par l’inconsistance et ne permettent pas à l’enfant de construire un modèle stable d’attachement. Ces comportements reflètent à la fois une recherche et un évitement du contact, dans une grande incohérence et désorganisation. Les enfants peuvent rester figés lors de l’expérience comme s’ils vivaient une situation menaçante engendrant appréhension et peur. Les mouvements semblent incomplets et mal dirigés.

Plus récemment, Miljkovitch (2009) propose un modèle d’attachement « masqué » où l’enfant va utiliser d’autres comportements pour attirer le parent à lui venir en aide. Il peut se blesser et se mettre volontairement en danger afin d’accéder à sa figure d’attachement.

Selon Bowlby cité par Grossmann & Grossmann (1998, p. 56-57), « au premier anniversaire (…) pour la plupart des dyades, un pattern qui est susceptible de durer est déjà présent.

Cependant, d’autres moyens d’évaluations de l’attachement ont été mis au point depuis la situation étrange par différents auteurs.

d. L’évaluation de l’attachement

Nous évoquerons ici quelques tests d’évaluation de l’attachement :

  • L’AAI (Adult Attachment Interview) :

C’est un entretien semi – structuré qui vise à demander à un parent de décrire les relations qu’il a entretenues avec ses parents. Son objectif est de repérer les représentations d’attachement des adultes par l’intermédiaire de la narration des souvenirs d’enfance.

  • Les histoires à compléter (Attachment Story Completion Task) :

Cette méthode a été mise au point par Bretherton, Ridgeway et Cassidy en 1990. Cette épreuve peut être utilisée à partir de trois ans. Elle évalue les représentations de l’enfant. On présente à l’enfant des figurines ainsi qu’un début d’histoire et on lui demande de compléter cette histoire. L’ensemble des études réalisées depuis l’élaboration de l’ASCT, parfois avec d’autres codages, visent à démontrer que ce test est un outil qui reflète bien « certains aspects de modèles internes opérants de soi en relation avec les parents (Bretherton, 2008 p. 13). Cette épreuve pourrait être complétée par l’AAI (George, Kaplan et Main, 1985) afin de conforter le type d’attachement qui lie l’enfant à sa mère. Cependant, nous ne le retiendrons pas pour ne pas alourdir le protocole.

  • L’échelle de sécurité (Kerns, Klepac & Cole, 1996) :

L’échelle de Kerns est un auto – questionnaire pour enfant. Ce dernier répond lui-même aux questions. Elle fournit une progression des scores de sécurité pour les enfants interrogés.

Durant l’enfance, les comportements d’attachement sont en voie de disparition alors que percevoir la disponibilité de ses parents dans l’attachement devient un besoin plus important dans l’enfance et la pré – adolescence (Kerns, 1996). C’est pourquoi ce test semble le mieux placé pour cibler la qualité de l’attachement.

e. Les figures d’attachement

Si l’enfant est angoissé par quelque chose qu’il considère comme une menace, celui-ci va rechercher la proximité et la sécurité de la figure spécifique à laquelle il s’est attaché : la figure d’attachement.

Selon Ainsworth (1967), toute personne adulte qui s’engagera dans des interactions sociales avec le bébé ou l’enfant et qui répondra positivement à ses signaux d’alarme sera alors susceptible de devenir pour lui une figure d’attachement. Après avoir affirmé « la monotropie » de l’attachement en 1958, Bowlby (1969) soutient l’idée que l’enfant développe dans les liens affectifs une hiérarchie et distingue ainsi la figure d’attachement primaire des figures d’attachement secondaires. Cette hiérarchie s’établie en fonction de la force du sentiment de sécurité qui lui sont donné par les personnes qui prennent soin de lui.

Très souvent, la mère devient la figure d’attachement primaire ou principale. Celle –ci se forme durant la première année (Guedeney & Guedeney, 2009, p.95). Les figures d’attachement secondaire, intervenant par la suite peuvent être : le père, les grands – parents, les frères et sœurs ou encore « l’enseignant ».

L’enfant cherchera du réconfort auprès de sa figure d’attachement secondaire lorsque sa mère sera absente.

Pour notre étude, la figure d’attachement secondaire qui sera mise en avant sera : l’enseignant. Ce dernier a un rôle important dans la vie de l’enfant. S’il possède toutes les qualités requises pour devenir sa figure d’attachement, il permettra à l’enfant de suivre un parcours scolaire le plus adéquat pour lui (Delage, 2015).

En entrant à l’école, l’enfant va faire un premier pas dans la socialisation.

f. L’attachement et la socialisation :

Dans la théorie de l’attachement, l’attachement est vu comme un besoin social primaire qui permet à l’enfant de se développer au niveau affectif et au niveau social. Le fait de sécuriser l’enfant, lui permet d’explorer son environnement en développant des compétences sociales avec ses pairs. En fonction des modèles internes opérants que l’enfant a développés, l’enfant va interagir avec les autres (Bretherton & Munholland, 1999). Ils influencent le comportement du sujet dans ses rapports avec les autres (Bureau et Moss, 2010 et Miljkovitch, 2011)

En effet, les MIO des enfants sécures, leur sont plus favorables sur le plan des relations interpersonnelles et des émotions qu’elles entrainent. Cependant, les interactions que les enfants ont avec leur entourage lui permettent de se construire une image positive de soi et participent à une image positive d’autrui. Les relations avec les autres sont perçues comme gratifiantes. Elles réduisent les échanges conflictuels susceptibles d’engendrer des effets négatifs. La confiance que ces enfants ont d’eux-mêmes, les protège des difficultés qu’ils pourraient connaitre.

Ainsi, la sphère sociale serait indissociable de la sphère affective. Certaines études considèrent même la qualité d’attachement pendant l’enfance comme un indicateur du développement social à l’adolescence, les compétences scolaires (Aviezer &al, 2002, Granot, 2001).

Selon Dubois – Comtois, Cyr et Moss (2011), les échanges mère – enfant des enfants avec un attachement sécure, permettent à ces enfants de développer des stratégies de flexibilité et d’intégration des émotions, des comportements et des pensées associés aux relations d’attachement.

En revanche, les échanges mère – enfant des enfants avec un attachement insécure, vont amener ces enfants à développer des stratégies défensives qui vont faire que les modèles internes opérants vont résister aux changements. Ces enfants grandissent avec le sentiment de ne pas se faire aimer par les autres et que les relations sont sources de frustration. Ils développent alors une image négative d’eux même, des sentiments pénibles, et des difficultés à gérer les émotions négatives. Leurs MIO les conduisent à faire des erreurs d’attribution. Leur vécu affectif est négatif.

Les enfants insécures voient leurs relations mises en place auprès de leur parent se généraliser davantage que les enfants sécures. Ces enfants auraient un rapport au monde plus rigide à travers les différents domaines et situations.

En conclusion, quel que soit l’âge de l’enfant, la sécurité intériorisée donne à un enfant « une base de sécurité » (Guedeney & Guedeney, 2002 p 21). Grâce à cette confiance l’enfant est alors capable d’effectuer de nouvelles expériences d’attachement. L’attachement permet donc en favorisant l’exploration, une bonne estime de soi ainsi que l’accès à la compétence (Guedeney, N. 2011). C’est pourquoi à l’école, l’enfant va intérioriser les apprentissages scolaires selon son type d’attachement.

g. L’attachement et les apprentissages scolaires :

A son entrée à l’école, l’enfant fait trois nouvelles expériences :

  • La séparation avec sa figure d’attachement.
  • Il rencontre son enseignant qui est un adulte qu’il ne connait pas.
  • Il fait connaissance avec un groupe d’enfants avec qui il va développer la socialisation.

Il va de ce fait vivre de nouvelles expériences qui vont être pour lui : soit une source de stress, soit une source d’excitation. La façon dont il va les aborder dépendra de la confiance qu’il accorde à sa figure d’attachement. Ainsi si l’enseignant apparait comme une base de sécurité, l’enfant s’investira de façon positive dans la tâche scolaire. Il aura de meilleurs apprentissages que l’enfant pour lequel l’enseignant apparaitra comme une base non sécurisante.

Ainsi nous pouvons considérer l’enfant dans une dyade formé par l’enfant et l’enseignant au centre du triangle d’apprentissage (Geddes, 2012).

A : Le triangle d’apprentissage

Selon Delage (2015), Geddes (2006) a étudié la relation entre un élève, son enseignant et une tâche d’apprentissage en lien avec la relation d’attachement. Ces résultats montrent qu’un enfant apprend et réagit de manière différente en fonction de la tâche demandée, des attentes de l’enseignant envers eux et de leur type d’attachement.

 

B : Le triangle d’apprentissage selon le type d’attachement

  • Enfant avec un type d’attachement sécure :

Les émotions, ici sont bien régulées et mentalisées. Le développement des processus cognitifs est bon. Comme l’enfant est stimulé par la nouveauté, ce dernier est prêt pour l’apprentissage et les tâches scolaires. S’il ne parvient pas à effectuer l’exercice qui lui est demandé, l’enfant demandera à son enseignant et écoutera ses explications et ainsi réussira sa tâche. Ainsi, l’enfant va développer un sentiment d’efficacité qui lui donne confiance en lui.

 

  • Enfant avec un type d’attachement évitant :

Les émotions sont présentes et très peu mentalisées. Disposant d’un potentiel cognitif suffisant, l’enfant préférera les tâches scolaires à autre chose de façon à se protéger des émotions qu’il peut rencontrer. De plus, si les parents de ces enfants témoignent d’une certaine fierté face à la réussite de leur enfant, celui-ci va s’investir un peu plus dans le but de leur plaire.

Un enfant avec un type d’attachement évitant n’arrivant pas à effectuer sa tâche scolaire, se tiendra à distance de son enseignant qu’il ne trouvera pas rassurant. Le triangle d’apprentissage se fragilise par le fait que l’enfant se concentre sur sa tâche scolaire. Il n’y a plus que lui et sa tâche scolaire. L’enfant bute sur son exercice, contrôle les émotions négatives qu’il ressent mais en aucun cas demande l’aide à son enseignant.

 

  • Enfant avec un type d’attachement ambivalent

Débordés par leurs émotions, ces enfants n’arrivent pas à se concentrer sur les tâches scolaires. S’ils ne sont pas aidés, ce sont des enfants qui abandonneront rapidement les exercices scolaires.

Ici, le triangle d’apprentissage se fragilise d’une manière différente. L’enseignant apparait à l’enfant comme une figure d’attachement alternative. Mais ce dernier ne semble pas sûr de sa disponibilité pour lui en cas de besoin. L’enfant se sent en concurrence avec les enfants de sa classe. C’est pourquoi, il cherche à avoir l’exclusivité avec l’enseignant. Il peut se montrer collant avec lui. C’est un enfant d’humeur changeante. Les résultats aux tâches scolaires dépendent de la capacité de l’enseignant à apaiser l’enfant pour qu’il investisse l’exercice proposer.

 

  • Enfant avec un type d’attachement désorganisé

L’enfant présente des troubles comme l’impulsivité, l’instabilité psychomotrice, l’agressivité, l’opposition. Il se trouve dans des états nerveux qu’il n’arrive pas à maîtriser. Il lui est difficile dans son cas d’accomplir des tâches d’apprentissage. Cet enfant se montre comme un grand perturbateur dans la classe. Il n’accorde aucune confiance à l’adulte. Ces enfants ont un déficit attentionnel important qui fait que la tâche scolaire n’est pas investie. Ici, la relation avec l’enseignant est parfois inexistante.

 

Conclusion

Les résultats des études ci-dessus nous montrent l’importance du lien d’attachement dans le milieu scolaire. En effet, plus l’enfant possède un attachement sécure, plus ce dernier va se sentir en confiance et ainsi développer de très bonnes capacités cognitives. A l’inverse de l’enfant avec un attachement insécure qui va en développer de moins bonnes par manque de confiance en lui. Nous pouvons donc soumettre l’hypothèse qu’en effectuant un travail sur le lien d’attachement de l’enfant, nous pourrions améliorer ses capacités cognitives et ainsi celui-ci pourrait avoir de meilleurs résultats scolaires.

 

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